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Le salon de Balder
26 juin 2008

BEAUVOIR

Un mal honteux. J'avais secoué mon éducation puritaine juste assez pour pouvoir me réjouir de mon corps sans contrainte, pas assez pour consentir qu'il m'incommodât; affamé, mendiant, plaintif, il me répugnait. J'étais obligé d'admettre une vérité que depuis mon adolescence j'essayais de me masquer: ses appétits débordaient ma volonté. Dans les fièvres, les gestes, les actes qui me liaient à un homme choisi, je reconnaissais les mouvements de mon cœur et ma liberté; mais mes langueurs solitaires sollicitaient n'importe qui; la nuit, dans le train Tours- Paris, une main anonyme pouvait éveiller au long de ma jambe un trouble qui me bouleversait de dépit. Je taisais ces hontes; maintenant que j'étais entrainée à tout dire, ce mutisme m'apparaissait comme une pierre de touche: si je n'osais pas les confesser, c'est qu'elles étaient inavouables. Par le silence auquel il me contraignait, mon corps, au lieu d'un trait d'union, devenait un obstacle et je lui en avais une brûlante rancune.

La force de l'age tome I

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